Un oxymore : le métier d'écrivain
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Un oxymore : le métier d'écrivain
J'ai voulu noter quelques réflexions ici : écrire n'est pas un métier, et j'en suis de plus en plus convaincue.
Et c'est aussi valable pour les autres arts.
Il y a l'artiste, il y a l'artisan, ces deux faiseurs qu'on oppose et rapproche.
Chacun fabrique, avec son talent, un objet, l'artisan dans le domaine utilitaire en satisfaisant un besoin, l'artiste dans le non-utilitaire, le plaisir. Quand l'écrivain confectionne, pour un public ciblé, un livre, il devient artisan et en fait son métier.
Je pense aux auteurs de jeunesse qui ont déjà accumulé, en quelques années, une centaine de titres dans leur catalogue. La littérature de jeunesse est, à mon avis, la branche la plus visible de la littérature commerciale. Les deux mots vont très mal ensemble. Je n'ai rien contre l'idée que les enfants aient accès à des livres faits pour eux, c'est peut-être le mot littérature qui me gêne. Le style s'adapte à l'âge... Là, oui, ce métier rapporte sans doute de l'argent (et encore, de quoi vivre normalement), mais ce n'est plus être écrivain dans le sens noble où je l'entends. Je ne nie pas la difficulté qu'il y a à fabriquer toutes ces histoires, à se tenir à cette discipline de fabrication, autant qu'il me paraît compliqué de monter un garage ou de faire le câblage électrique d'une maison. Il faut en avoir le courage et la capacité. Mais est-ce écrire?
Le sens noble du verbe "écrire", c'est celui de l'écrivain inspiré, qui fait son œuvre gigantesque ou minimale, Une Recherche du temps perdu ou des Chants de Maldoror, qui travaille (je ne crois pas au génie fainéant), qui se donne cette peine d'accéder à sa matière, dans le sentiment de réaliser quelque chose de grand. C'est un alchimiste qui, en fabriquant de l'or, ne pense pas au commerce qu'il en fera, juste au miracle qu'il réalise.
Écrire a sans doute plusieurs définitions et renferme de nombreuses intentions.
Mais j'ai l'impression que, dans ce monde libéral, c'est un moyen comme un autre d'espérer avoir de l'argent, et un nom en prime, ou même un nom qui vaut de l'argent. Et le nom précède souvent l'œuvre.
Peut-on dire de Baudelaire, de Zola, que leur métier était écrivain? Ça ne viendrait à l'idée de personne. Ils "sont", ils "étaient", leur vie était à écrire.
J'aime repenser à Mallarmé en professeur d'anglais, qui travaillait pour gagner son pain et dont" la vraie vie (était) ailleurs."
On associe souvent l'artiste des autres siècles à la pauvreté alors qu'aujourd'hui, on se dit : je vais écrire pour gagner de l'argent et être connu! C'est une drôle d'époque où l'utile précède la création.
Mallarmé
Se délier des contraintes matérielles en exerçant une profession, se mettre à l'abri du besoin pour créer, n'est-ce pas là, l'honnêteté artistique?
Ne pas savoir qui l'on vise, créer parce que c'est nécessaire à soi, avec parfois la récompense d'être lu? Le véritable écrivain devrait être prêt à donner son œuvre pour qu'on la lise. Prêt à payer, peut-être pas, car ce serait la démarche inverse : je paye pour qu'on me lise détruit aussi totalement la valeur de la création.
Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
Re: Un oxymore : le métier d'écrivain
Kashima a écrit:[...] l'artisan dans le domaine utilitaire en satisfaisant un besoin, l'artiste dans le non-utilitaire, le plaisir.[...]
Je te pique juste cette petite phrase pour ouvrir mon commentaire – cette petite phrase et pas une autre puisqu’elle synthétise à mon sens l’ensemble de la question.
Je ne crois pas qu’il faille cette coupure franche entre artiste et artisan, pas plus qu’entre besoin et plaisir : ce dernier étant vital devient il devient plus « besoin » que le « besoin », de même qu’un « besoin » convenablement appréhendé à toutes chances de se retrouver au chapitre des « plaisirs ». On ne peut vivre en l’absence totale des stimuli provoqués par lesdits, ils sont INDISPENSABLES et en ont réellement (« physiquement ») sauvé plus d’un(e), moi la première. Quand rien ne va il me reste mes amis les mots…
Bon, je voulais développer mais j’ai guinché toute la nuit (oui oui, à mon grand âge...) et je dois avouer que malgré ma bonne volonté j’ai un peu les idées en vrac ce matin. Suite au prochain épisode, donc...
x 1001.
Je ne crois pas qu’il faille cette coupure franche entre artiste et artisan, pas plus qu’entre besoin et plaisir : ce dernier étant vital devient il devient plus « besoin » que le « besoin », de même qu’un « besoin » convenablement appréhendé à toutes chances de se retrouver au chapitre des « plaisirs ». On ne peut vivre en l’absence totale des stimuli provoqués par lesdits, ils sont INDISPENSABLES et en ont réellement (« physiquement ») sauvé plus d’un(e), moi la première. Quand rien ne va il me reste mes amis les mots…
Bon, je voulais développer mais j’ai guinché toute la nuit (oui oui, à mon grand âge...) et je dois avouer que malgré ma bonne volonté j’ai un peu les idées en vrac ce matin. Suite au prochain épisode, donc...
x 1001.
Nicole.
Re: Un oxymore : le métier d'écrivain
La distinction n'est pas très subtile, il est vrai, et dans l'artisan, il y a de l'artiste, dans l'artiste de l'artisan.
Idem entre besoin et plaisir, comme tu le dis - même si dans l'échelle des valeurs, le plaisir me semble plus noble (encore ce mot), non? Un cran au-dessus, je dirais.
Idem entre besoin et plaisir, comme tu le dis - même si dans l'échelle des valeurs, le plaisir me semble plus noble (encore ce mot), non? Un cran au-dessus, je dirais.
Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
"Ecrivain, un vrai travail ?"
http://www.franceinter.fr/emission-le-57-du-week-end-ecrivain-un-vrai-travail
"Ecrivain, un vrai travail ?" Emission du 12 mai
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Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
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