Auteurs oubliés...
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Auteurs oubliés...
Qui est Harry Alis? (1857-1895)
Harry Alis, de son vrai nom Jules-Hippolyte Percher, est né à Couleuvre (Allier) le 7 octobre 1857.
Il fit des études studieuses à Moulins où il rencontra Maurice Guillemot son aîné, professeur et homme de lettres. C'est lui qui le conduisit au Quartier Latin et par qui il fréquenta les cafés et les brasseries littéraires (le jour, un peu moins la nuit).
Il fit la connaissance de Crampel, le jeune explorateur de l'Afrique, et convaincu d'apprécier la nécessité de combattre en Afrique l'influence anglaise, il fut le promoteur dévoué des expéditions Crampel, Dybowski, Maistre, Mizon et de tant d'autres.
Ses livres, A la conquête du Tchad, Nos Africains, Promenades en Egypte, ses articles dans la presse parisienne ne lui semblaient même plus dans les derniers temps une aide assez puissante aux explorateurs et aux colons dont il patronnait l'initiative, et il venait de fonder au Caire le Journal égyptien destiné à défendre là-bas les intérêts français.
Il laissa un fils de quatorze ans, né d'un premier mariage, et qui vit rue Vauquelin avec sa grand-mère et Mme Harry Alis.
M. Harry Alis a été nommé chevalier de la Légion d'honneur.
Comment est-il mort?
Pour d'obscures raisons (accusation portée par Le Châtelier sur une compromission possible d’Alis avec des intérêts belges en Afrique, lui-même ayant été précédemment accusé par Alis de rechercher des avantages économiques en Afrique occidentale.?), il fut provoqué en duel par un de ses camarades du Comité de l'Afrique française, ce Le Châtelier.
Le duel à l'épée eut lieu le 1 mars 1895 à 11 heures trente du matin à l'île de la Grande Jatte, dans la salle de bal du restaurant "Le Moulin-Rouge'. Le tenancier vint le chercher dans sa voiture et le conduisit bras-dessus-bras-dessous dans la salle de bal, où en lettres d'or, s'étalait une inscription extraite de vers de Dante : "Vous qui passez, venez vous réjouir".
Les deux hommes montèrent l'escalier à double rampe qui conduisait à la salle de restaurant, vide pour la circonstance.
Le Châtelier était déjà là avec ses témoins. Les combattants, en manches de chemises avec un plastron se mirent en garde. Le combat dura peu, Harry fut touché sous l'aisselle droite. Il chancela, porta la main à sa poitrine. Les témoins l'aidèrent à s'asseoir sur une chaise. Des médecins posèrent un tampon d'ouate sur la plaie. L'épée avait transpercée la poitrine. Alis murmura : "Je suis perdu'", il ferma les yeux, il était mort. En attendant le commissaire de police de Levallois, on transporta son corps au rez-de-chaussée sur un billard que l'on avait recouvert d'un drap.
Les journaux ne firent pas beaucoup d'écho en parlant de son œuvre, les écrivains et les critiques pas davantage.
Seul, Charles Mauras rendit hommage au talent de l"écrivain :
"Je reste fidèle au souvenir que nous laissa en 1889 ou 1890, un petit recueil de nouvelles signé Harry Alis intitulé : Quelques fous. On y voyait passer mille personnages , très beaux de logique et dessinés avec une grande énergie. J'avoue que je fus sur le point de me demander si l'auteur du livre ne serait pas notre Edgard Poe."
A propos de son oeuvre :
Ami et protégé de Maupassant, proche de Zola, remarqué par Flaubert et Huysmans, Harry Alis est l'auteur de Hara-Kiri. Il connaissait bien les milieux décrits dans ce roman. (cf. ci-dessus)
Alis, en 1878 fonda la Revue moderne et naturaliste avec son ami Guy Tomel, il dirigea le Panurge (octobre 1882 – avril 1883) dont le rédacteur en chef-gérant était Félicien Champsaur, il fut hydropathe (Les Hydropathes est un club littéraire parisien, fondé par le poète et romancier Émile Goudeau, et qui a existé entre 1878 et 1880 puis, de façon éphémère, en 1884.et connu la bohème littéraire et le milieux des petites revues des années 1880.)
A travers les pérégrinations d'un digne fils de samouraï dans divers milieux parisiens - des cafés de la rive gauche aux hôtels particuliers de la rive droite en passant par le célèbre salon de Nina de Villard - l'auteur donne ici un plaisant et cruel roman d'apprentissage situé en une époque (la IIIe République) que Baudelaire qualifiait de grande barbarie éclairée au gaz .
Intrigues en tous genres, adultères, duels, suicides, règlements de compte, retournements de situation et revers de fortune : ces aventures d'un fils de l'empire du Soleil-Levant dans la Ville lumière tiennent avec bonheur le milieu entre Balzac et Dumas.
Attaché à l'école naturaliste, admirateur de Maupassant, il laisse quelques romans et recueils de nouvelles : avec Guy Tomel [pseud. de Gabriel Guillemot], Le revers de la médaille, A. Cinqualbre, [1878], Hara-Kiri, Paul Ollendorff, 1882 - Les Pas de chance, Bruxelles, Henry Kistemaeckers, 1883. Eau forte de Brunin (portrait de Harry Alis) - Reine Soleil. Une fille de la glèbe, Paul Ollendorff, 1884 - Miettes, Jules Lévy, 1885 - Petite ville. Jules Lévy, 1886 - Quelques fous, Alphonse Lemerre, 1889.
La gloire n'arrivant sans doute pas assez vite, Harry Alis se tournera vers le journalisme et se fera le défenseur des entreprises coloniales françaises en Afrique
Harry Alis, de son vrai nom Jules-Hippolyte Percher, est né à Couleuvre (Allier) le 7 octobre 1857.
Il fit des études studieuses à Moulins où il rencontra Maurice Guillemot son aîné, professeur et homme de lettres. C'est lui qui le conduisit au Quartier Latin et par qui il fréquenta les cafés et les brasseries littéraires (le jour, un peu moins la nuit).
Il fit la connaissance de Crampel, le jeune explorateur de l'Afrique, et convaincu d'apprécier la nécessité de combattre en Afrique l'influence anglaise, il fut le promoteur dévoué des expéditions Crampel, Dybowski, Maistre, Mizon et de tant d'autres.
Ses livres, A la conquête du Tchad, Nos Africains, Promenades en Egypte, ses articles dans la presse parisienne ne lui semblaient même plus dans les derniers temps une aide assez puissante aux explorateurs et aux colons dont il patronnait l'initiative, et il venait de fonder au Caire le Journal égyptien destiné à défendre là-bas les intérêts français.
Il laissa un fils de quatorze ans, né d'un premier mariage, et qui vit rue Vauquelin avec sa grand-mère et Mme Harry Alis.
M. Harry Alis a été nommé chevalier de la Légion d'honneur.
Comment est-il mort?
Pour d'obscures raisons (accusation portée par Le Châtelier sur une compromission possible d’Alis avec des intérêts belges en Afrique, lui-même ayant été précédemment accusé par Alis de rechercher des avantages économiques en Afrique occidentale.?), il fut provoqué en duel par un de ses camarades du Comité de l'Afrique française, ce Le Châtelier.
Le duel à l'épée eut lieu le 1 mars 1895 à 11 heures trente du matin à l'île de la Grande Jatte, dans la salle de bal du restaurant "Le Moulin-Rouge'. Le tenancier vint le chercher dans sa voiture et le conduisit bras-dessus-bras-dessous dans la salle de bal, où en lettres d'or, s'étalait une inscription extraite de vers de Dante : "Vous qui passez, venez vous réjouir".
Les deux hommes montèrent l'escalier à double rampe qui conduisait à la salle de restaurant, vide pour la circonstance.
Le Châtelier était déjà là avec ses témoins. Les combattants, en manches de chemises avec un plastron se mirent en garde. Le combat dura peu, Harry fut touché sous l'aisselle droite. Il chancela, porta la main à sa poitrine. Les témoins l'aidèrent à s'asseoir sur une chaise. Des médecins posèrent un tampon d'ouate sur la plaie. L'épée avait transpercée la poitrine. Alis murmura : "Je suis perdu'", il ferma les yeux, il était mort. En attendant le commissaire de police de Levallois, on transporta son corps au rez-de-chaussée sur un billard que l'on avait recouvert d'un drap.
Les journaux ne firent pas beaucoup d'écho en parlant de son œuvre, les écrivains et les critiques pas davantage.
Seul, Charles Mauras rendit hommage au talent de l"écrivain :
"Je reste fidèle au souvenir que nous laissa en 1889 ou 1890, un petit recueil de nouvelles signé Harry Alis intitulé : Quelques fous. On y voyait passer mille personnages , très beaux de logique et dessinés avec une grande énergie. J'avoue que je fus sur le point de me demander si l'auteur du livre ne serait pas notre Edgard Poe."
A propos de son oeuvre :
Ami et protégé de Maupassant, proche de Zola, remarqué par Flaubert et Huysmans, Harry Alis est l'auteur de Hara-Kiri. Il connaissait bien les milieux décrits dans ce roman. (cf. ci-dessus)
Alis, en 1878 fonda la Revue moderne et naturaliste avec son ami Guy Tomel, il dirigea le Panurge (octobre 1882 – avril 1883) dont le rédacteur en chef-gérant était Félicien Champsaur, il fut hydropathe (Les Hydropathes est un club littéraire parisien, fondé par le poète et romancier Émile Goudeau, et qui a existé entre 1878 et 1880 puis, de façon éphémère, en 1884.et connu la bohème littéraire et le milieux des petites revues des années 1880.)
A travers les pérégrinations d'un digne fils de samouraï dans divers milieux parisiens - des cafés de la rive gauche aux hôtels particuliers de la rive droite en passant par le célèbre salon de Nina de Villard - l'auteur donne ici un plaisant et cruel roman d'apprentissage situé en une époque (la IIIe République) que Baudelaire qualifiait de grande barbarie éclairée au gaz .
Intrigues en tous genres, adultères, duels, suicides, règlements de compte, retournements de situation et revers de fortune : ces aventures d'un fils de l'empire du Soleil-Levant dans la Ville lumière tiennent avec bonheur le milieu entre Balzac et Dumas.
Attaché à l'école naturaliste, admirateur de Maupassant, il laisse quelques romans et recueils de nouvelles : avec Guy Tomel [pseud. de Gabriel Guillemot], Le revers de la médaille, A. Cinqualbre, [1878], Hara-Kiri, Paul Ollendorff, 1882 - Les Pas de chance, Bruxelles, Henry Kistemaeckers, 1883. Eau forte de Brunin (portrait de Harry Alis) - Reine Soleil. Une fille de la glèbe, Paul Ollendorff, 1884 - Miettes, Jules Lévy, 1885 - Petite ville. Jules Lévy, 1886 - Quelques fous, Alphonse Lemerre, 1889.
La gloire n'arrivant sans doute pas assez vite, Harry Alis se tournera vers le journalisme et se fera le défenseur des entreprises coloniales françaises en Afrique
Dernière édition par Kashima le Dim 2 Oct 2011 - 17:56, édité 2 fois
Kashima- Faux-monnayeur
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Kashima- Faux-monnayeur
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A la découverte de Charles-Louis Philippe
Voici un auteur dont le nom lui a fait préjudice, parce qu'on le voit plutôt en roi de France qu'en écrivain... Charles-Louis Philippe est né à Cérilly en 1874 (près de Montluçon dans l'Allier), et il est mort jeune, à 35 ans, d'une fièvre typhoïde et d'une méningite.
Il est l'auteur de romans qui portent le nom de Croquignole, Bubu de Montparnasse, et de Marie Donadieu - c'est par ce livre que j'ai eu envie de le découvrir.
Ce n'est pas un écrivain régionaliste. Lors de la conférence que j'ai pu suivre hier, ce qui m'a donné envie de le lire, c'est l'appréciation que son professeur de français avait écrite à propos de son style (citation approximative): "Vous écrirez bien quand vous cesserez de le faire en illuminé."
Il fréquenta Jammes, Gide, Giraudoux... Pourquoi a-t-il été oublié? Les Amis de Charles-Louis Philippe tentent de réhabiliter sa mémoire...
Marie Donadieu m'a été présenté comme le livre d'une passion que Philippe aurait écrit après sa rupture avec la femme qui porte vraiment ce nom. J'en parlerai davantage quand je l'aurai terminé, mais pour le moment, j'ai pu lire ceci, la façon changée qu'à Marie de voir le monde quand elle tombe amoureuse de Raphaël :
"Jamais elle ne s'était imaginée que les pigeons étaient des colombes. Un coin du monde en fut changé, la poésie s'accrut d'un oiseau."
Ou encore ce qu'elle ressent dans cette passion naissante :
"Elle marcha beaucoup dans les allées. A quelque tournant, il allait apparaître. D'ailleurs il était là, ses souvenirs jonchaient le sol, sur lequel elle se baissait et cueillait par brassées des images qu'ensuite elle ne pouvait plus laisser choir.
Mais il y avait d'autres jours. Il y avait des soirs où, sous sa robe, son corps vivait dans la solitude. Son échine électrisée par les temps lourds ne pouvait plus supporter la moelle de ses vertèbres et, dans sa gorge, ce goût du sang, ce trop-plein de la vie qui la débordait, lui faisaient un mal à mourir." (41)
Autre chose m'a semblé rendre cet auteur intéressant, c'est son engagement socialiste, le fait qu'il ne s'est jamais détourné des gens modestes, de son milieu, des pauvres, malgré son succès littéraire, cette "ascension" :
« Ma grand-mère était mendiante, mon père, qui était un enfant plein d’orgueil, a mendié lorsqu’il était trop jeune pour gagner son pain. J’appartiens à une génération qui n’est pas encore passé par les livres. [...] Il faut que je vous rappelle qu’il est en moi des vérités plus impérieuses que celles que vous appelez « les vérités françaises ». Vous séparez les nationalités, c’est ainsi que vous différenciez le monde, moi je sépare les classes. [...] Nous avons été murés comme des pauvres et, parfois, lorsque la Vie entrait chez nous, elle portait un bâton. Nous n’avons eu comme ressource que de nous aimer les uns les autres. C’est pourquoi j’écris toujours plus tendre que ma tête ne le commande. Je crois être en France le premier d’une race de pauvres qui soit allée dans les lettres. »
Il est l'auteur de romans qui portent le nom de Croquignole, Bubu de Montparnasse, et de Marie Donadieu - c'est par ce livre que j'ai eu envie de le découvrir.
Ce n'est pas un écrivain régionaliste. Lors de la conférence que j'ai pu suivre hier, ce qui m'a donné envie de le lire, c'est l'appréciation que son professeur de français avait écrite à propos de son style (citation approximative): "Vous écrirez bien quand vous cesserez de le faire en illuminé."
Il fréquenta Jammes, Gide, Giraudoux... Pourquoi a-t-il été oublié? Les Amis de Charles-Louis Philippe tentent de réhabiliter sa mémoire...
Marie Donadieu m'a été présenté comme le livre d'une passion que Philippe aurait écrit après sa rupture avec la femme qui porte vraiment ce nom. J'en parlerai davantage quand je l'aurai terminé, mais pour le moment, j'ai pu lire ceci, la façon changée qu'à Marie de voir le monde quand elle tombe amoureuse de Raphaël :
"Jamais elle ne s'était imaginée que les pigeons étaient des colombes. Un coin du monde en fut changé, la poésie s'accrut d'un oiseau."
Ou encore ce qu'elle ressent dans cette passion naissante :
"Elle marcha beaucoup dans les allées. A quelque tournant, il allait apparaître. D'ailleurs il était là, ses souvenirs jonchaient le sol, sur lequel elle se baissait et cueillait par brassées des images qu'ensuite elle ne pouvait plus laisser choir.
Mais il y avait d'autres jours. Il y avait des soirs où, sous sa robe, son corps vivait dans la solitude. Son échine électrisée par les temps lourds ne pouvait plus supporter la moelle de ses vertèbres et, dans sa gorge, ce goût du sang, ce trop-plein de la vie qui la débordait, lui faisaient un mal à mourir." (41)
Autre chose m'a semblé rendre cet auteur intéressant, c'est son engagement socialiste, le fait qu'il ne s'est jamais détourné des gens modestes, de son milieu, des pauvres, malgré son succès littéraire, cette "ascension" :
« Ma grand-mère était mendiante, mon père, qui était un enfant plein d’orgueil, a mendié lorsqu’il était trop jeune pour gagner son pain. J’appartiens à une génération qui n’est pas encore passé par les livres. [...] Il faut que je vous rappelle qu’il est en moi des vérités plus impérieuses que celles que vous appelez « les vérités françaises ». Vous séparez les nationalités, c’est ainsi que vous différenciez le monde, moi je sépare les classes. [...] Nous avons été murés comme des pauvres et, parfois, lorsque la Vie entrait chez nous, elle portait un bâton. Nous n’avons eu comme ressource que de nous aimer les uns les autres. C’est pourquoi j’écris toujours plus tendre que ma tête ne le commande. Je crois être en France le premier d’une race de pauvres qui soit allée dans les lettres. »
Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
Re: Auteurs oubliés...
L'idée que l'on se fait d'une chose n'est pas toujours à sa hauteur... Je n'ai pas pu lire Marie Donadieu jusqu'au bout, il m'est tombé des mains, et non à cause d'une quelconque difficulté de style... Je ne comprends pas bien : la seule réserve qu'on opposait à sa lecture avait été un style à la Mallarmé, ce qui au contraire m'avait attiré dans ces filets. On en est loin, bien loin...
Kashima- Faux-monnayeur
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