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Edgar Allan Poe, poésie et fantastique

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Edgar Allan Poe, poésie et fantastique Empty Edgar Allan Poe, poésie et fantastique

Message  Kashima Lun 24 Mai 2010 - 16:59

Un de mes auteurs préférés depuis mon adolescence, c'est Edgar Poe. Son univers peuplé d'héroïnes mourantes, dans des manoirs, la folie des personnages m'est cher.

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Histoires extraordinaires, Nouvelles histoires extraordinaires et Histoires grotesques et sérieuses regroupent des nouvelles comme Le Chat noir, Le Masque de la Mort rouge, Bérénice, Le Puits et le Pendule...

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J'ai voulu relire La Chute de la Maison Usher, parmi ses nouvelles les plus connues : le narrateur doit aller voir d'urgence un ami d'enfance, Roderick Usher, dans son manoir vieux et immuable :
"une atmosphère qui n'avait pas d'affinité avec l'air du ciel, mais qui s'exhalait des arbres dépéris, des murailles grisâtres et de l'étang silencieux, - une vapeur mystérieuse et pestilentielle, à peine visible, lourde, paresseuse et d'une couleur plombée." (109, Ldp)

Cet ami d'enfance est atteint d'un mal étrange, une "acuité morbide des sens". La famille Usher a toujours vécu refermée sur elle-même. La soeur de Roderick, Lady Madeline, n'a plus longtemps à vivre à l'arrivée du narrateur. On la voit errer dans le manoir, tel un fantôme.
Quelques jours après, elle meurt : son frère demande au narrateur de l'aider à l'exposer quinze jours dans la cave, dans sa bière, "en attendant l'enterrement définitif"...

"Le mal qui avait mis au tombeau lady Madeline dans la plénitude de sa jeunesse avait laissé, comme cela arrive ordinairement dans toutes les maladies d’un caractère strictement cataleptique, l’ironie d’une faible coloration sur le sein et sur la face, et sur la lèvre ce sourire équivoque et languissant qui est si terrible dans la mort. Nous replaçâmes et nous vissâmes le couvercle et, après avoir assujetti la porte de fer, nous reprîmes avec lassitude notre chemin vers les appartements supérieurs, qui n’étaient guère moins mélancoliques."

On peut entendre cette chanson :

I

Dans la plus verte de nos vallées,
Par les bons anges habitée,
Autrefois un beau et majestueux palais,
— Un rayonnant palais, — dressait son front.
C’était dans le domaine du monarque Pensée,
C’était là qu’il s’élevait :
Jamais séraphin ne déploya son aile
Sur un édifice à moitié aussi beau.

II

Des bannières blondes. superbes, dorées,
A son dôme flottaient et ondulaient ;
(C’était, — tout cela, c’était dans le vieux,
Dans le très vieux temps,)
Et, à chaque douce brise qui se jouait
Dans ces suaves journées,
Le long des remparts chevelus et pâles,
S’échappait un parfum ailé.

III

Les voyageurs, dans cette heureuse vallée,
A travers deux fenêtres lumineuses, voyaient
Des esprits qui se mouvaient harmonieusement
Au commandement d’un luth bien accordé.
Tout autour d’un trône, où, siégeant
— Un vrai Porphyrogénète, celui-là ! —
Dans un apparat digne de sa gloire,
Apparaissait le maître du royaume.

IV

Et tout étincelante de nacre et de rubis
Était la porte du beau palais,
Par laquelle coulait à flots, à flots, à flots,
Et pétillait incessamment
Une troupe d’Echos dont l’agréable fonction
Était simplement de chanter,
Avec des accents d’une exquise beauté,
L’esprit et la sagesse de leur roi.

V

Mais des êtres de malheur, en robes de deuil,
Ont assailli la haute autorité du monarque.
— Ah ! pleurons ! Car jamais l’aube d’un lendemain
Ne brillera sur lui, le désolé ! —
Et tout autour de sa demeure, la gloire
Qui s’empourprait et florissait
N’est plus qu’une histoire, souvenir ténébreux
Des vieux âges défunts.

VI

Et maintenant les voyageurs, dans cette vallée,
A travers les fenêtres rougeâtres, voient
De vastes formes qui se meuvent fantastiquement Aux sons d’une musique discordante ;
Pendant que, comme une rivière rapide et lugubre,
A travers la porte pâle,
Une hideuse multitude se rue éternellement ;
Qui va éclatant de rire, — ne pouvant plus sourire.

Edgar Allan Poe, poésie et fantastique 851331usher


L'ambiance est mélancolique, morbide, poétique, sombre. La traduction de Baudelaire n'enlève jamais rien à ce texte déjà beau.

Il existe plusieurs adaptations cinématographiques (dont l'une pour la télévision, avec Fanny Ardant qui joue lady Madeline) et jeudi, je pourrai acquérir cet ouvrage qui comprend la mise en musique de la nouvelle, aux éditions Horripeaux :

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http://www.myspace.com/horripeaux (extraits ici)

La musique est de Pied gauche (http://www.myspace.com/piedgauche)

Le moment où le narrateur lit à son ami des passages de Mad Trist, de sir Launcelot Canning, est attendue dans cette adaptation par Horripeaux et Pied gauche : car les bruits qui se font entendre dans le manoir devraient être effrayants...Inutile de chercher ce livre, dont le héros est Ethelred, car Poe l'a inventé de toutes pièces.

Extrait d'une adaptation de Jean Epstein (1928) :


Rendez-vous :

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Quelques rappels (source, Wikipedia) :

La Chute de la maison Usher (The Fall of the House of Usher) est une nouvelle fantastique écrite par Edgar Allan Poe. Elle fut publiée pour la première fois en septembre 1839 dans une revue littéraire. Cette nouvelle figure parmi les textes des Nouvelles histoires extraordinaires. Elle a été traduite en français, comme la plupart de ses contes, par Charles Baudelaire et est considérée comme étant sa nouvelle la plus célèbre.

Thèmes

* Le double (Poe mentionne la ressemblance frappante entre le frère et la soeur) que l'écrivain abordera plus en détail dans William Wilson.
* La mort et la résurrection d'une femme (traité également dans Ligeia et Morella).
* La maladie mentale (explorée aussi dans Bérénice).
* L'enterrement vivant (que l'on retrouve dans la Barrique d'amontillado).


Adaptations

Un opéra inachevé de Claude Debussy s'inspire également de la nouvelle.
Dans les Chroniques martiennes, Ray Bradbury rend hommage à la nouvelle dans Usher II.
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Message  Kashima Lun 24 Mai 2010 - 18:50

Monomanie dans la nouvelle Bérénice, que je conseille : c'est un petit bijou!

Edgar Allan Poe, poésie et fantastique 402102844e10adf53ea


Egaeus souffre de cette maladie :

"Cette monomanie, s'il faut que je me serve de ce terme, consistait dans une irritabilité morbide des facultés de l’esprit que la langue philosophique comprend dans le mot : facultés d’attention. Il est plus que probable que je ne suis pas compris ; mais je crains, en vérité, qu’il ne me soit absolument impossible de donner au commun des lecteurs une idée exacte de cette nerveuse intensité d’intérêt avec laquelle, dans mon cas, la faculté méditative, — pour éviter la langue technique, — s’appliquait et se plongeait dans la contemplation des objets les plus vulgaires du monde.

Réfléchir infatigablement de longues heures, l’attention rivée à quelque citation puérile sur la marge ou dans le texte d’un livre, — rester absorbé, la plus grande partie d’une journée d’été, dans une ombre bizarre s’allongeant obliquement sur la tapisserie ou sur le plancher, — m’oublier une nuit entière à surveiller la flamme droite d’une lampe ou les braises du foyer, — rêver des jours entiers sur le parfum d’une fleur, — répéter, d’une manière monotone, quelque mot vulgaire, jusqu’à ce que le son, à force d’être répété, cessât de présenter à l’esprit une idée quelconque, — perdre tout sentiment de mouvement ou d’existence physique dans un repos absolu obstinément prolongé, — telles étaient quelques-unes des plus communes et des moins pernicieuses aberrations de mes facultés mentales, aberrations qui sans doute ne sont pas absolument sans exemple, mais qui défient certainement toute explication et toute analyse."


Son attention se focalise sur les dents de sa cousine, Bérénice, qu'il a épousée. Il ne peut plus se détacher de ces petites choses qui sont pour lui des idées!

"Je les vis même alors plus distinctement que je ne les avais vues tout à l’heure. — Les dents ! — les dents ! — Elles étaient là, — et puis là, — et partout, — visibles, palpables devant moi ; longues, étroites et excessivement blanches, avec les lèvres pâles se tordant autour, affreusement distendues comme elles étaient naguère. Alors arriva la pleine furie de ma monomanie, et je luttai en vain contre son irrésistible et étrange influence."


Edgar Allan Poe, poésie et fantastique 12172h350


La chute est magnifique, inattendue, folle!
Une de mes nouvelles préférées de Poe, depuis toujours.

Quelques phrases à retenir, pour leur force ou leur beauté :
"credibile est quia ineptum est ; et sepultus resurrexit ; certum est quia impossibile est"

"Dans l’étrange anomalie de mon existence, les sentiments ne me sont jamais venus du cœur, et mes passions sont toujours venues de l’esprit."

"Les lèvres livides se tordaient en une espèce de sourire, et à travers leur cadre mélancolique les dents de Bérénice, blanches, luisantes, terribles, me regardaient encore avec une trop vivante réalité."


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Edgar Allan Poe, poésie et fantastique Empty Horripeaux à la Coopé

Message  Kashima Ven 28 Mai 2010 - 21:26

Très bonne soirée, très bonne mise en scène : les dessins projetés sur l'écran sont hypnotisants. Les deux voix lisent, au son de la musique. Moment fort : le poème de Roderick chanté en anglais; derrière un micro.
Envie de le relire dans sa langue d'origine.

The Haunted Palace

I

In the greenest of our valleys,
By good angels tenanted,
Once a fair and stately palace—
Radiant palace—reared its head.
In the monarch Thought’s dominion—
It stood there!
Never seraph spread a pinion
Over fabric half so fair.


II

Banners yellow, glorious, golden,
On its roof did float and flow;
(This—all this—was in the olden
Time long ago)
And every gentle air that dallied,
In that sweet day,
Along the ramparts plumed and pallid,
A wingèd odor went away.


III

Wanderers in that happy valley
Through two luminous windows saw
Spirits moving musically
To a lute’s well-tunèd law,
Round about a throne, where sitting
(Porphyrogene!)
In state his glory well befitting,
The ruler of the realm was seen.


IV

And all with pearl and ruby glowing
Was the fair palace door,
Through which came flowing, flowing, flowing
And sparkling evermore,
A troop of Echoes whose sweet duty
Was but to sing,
In voices of surpassing beauty,
The wit and wisdom of their king.


V

But evil things, in robes of sorrow,
Assailed the monarch’s high estate
(Ah, let us mourn, for never morrow
Shall dawn upon him, desolate!);
[ 74 ] And, round about his home, the glory
That blushed and bloomed
Is but a dim-remembered story
Of the old time entombed.


VI

And travelers now within that valley,
Through the red-litten windows, see
Vast forms that move fantastically
To a discordant melody;
While, like a rapid ghastly river,
Through the pale door,
A hideous throng rush out forever,
And laugh—but smile no more.


http://en.wikisource.org/wiki/The_Fall_of_the_House_of_Usher

Maison d'édition naissante, Horripeaux donne envie d'être soutenue. Elle propose la lecture d'une nouvelle, sa mise en musique et en images. Prochaine nouvelle : William Blake
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Message  Kashima Ven 15 Avr 2011 - 16:38

Edgar Allan Poe, poésie et fantastique Tumblr15

La crête des montagnes sommeille ; la vallée, le rocher et la caverne sont muets.
Alcman.


Écoutez-moi, — dit le Démon, en plaçant sa main sur ma tête —. La contrée dont je parle est une contrée lugubre en Libye, sur les bords de la rivière Zaïre. Et là, il n’y a ni repos ni silence.

Les eaux de la rivière sont d’une couleur safranée et malsaine ; et elles ne coulent pas vers la mer, mais palpitent éternellement, sous l’oeil rouge du Soleil, avec un mouvement tumultueux et convulsif. De chaque côté de cette rivière au lit vaseux s’étend, à une distance de plusieurs milles, un pâle désert de gigantesques nénuphars. Ils soupirent l’un vers l’autre dans cette solitude, et tendent vers le ciel leurs longs cous de spectres, et hochent de côté et d’autre leurs têtes sempiternelles. Et il sort d’eux un murmure confus qui ressemble à celui d’un torrent souterrain. Et ils soupirent l’un vers l’autre.

Mais il y a une frontière à leur empire, et cette frontière est une haute forêt, sombre, horrible. Là, comme les vagues autour des Hébrides, les petits arbres sont dans une perpétuelle agitation. Et cependant il n’y a pas de vent dans le ciel. Et les vastes arbres primitifs vacillent éternellement de côté et d’autre avec un fracas puissant. Et de leurs hauts sommets filtre, goutte à goutte, une éternelle rosée. Et à leurs pieds d’étranges fleurs vénéneuses se tordent dans un sommeil agité. Et sur leurs têtes, avec un frou-frou retentissant, les nuages gris se précipitent, toujours vers l’ouest, jusqu’à ce qu’ils roulent en cataracte derrière la muraille enflammée de l’horizon. Cependant il n’y a pas de vent dans le ciel. Et sur les bords de la rivière Zaïre, il n’y a ni calme ni silence.

C’était la nuit, et la pluie tombait ; et quand elle tombait, c’était de la pluie, mais quand elle était tombée, c’était du sang. Et je me tenais dans le marécage parmi les grands nénuphars, et la pluie tombait sur ma tête, — et les nénuphars soupiraient l’un vers l’autre dans la solennité de leur désolation.

Et tout d’un coup, la lune se leva à travers la trame légère du brouillard funèbre, et elle était d’une couleur cramoisie. Et mes yeux tombèrent sur un énorme rocher grisâtre qui se dressait au bord de la rivière, et qu’éclairait la lueur de la lune. Et le rocher était grisâtre, et sinistre, et très haut, — et le rocher était grisâtre. Sur son front de pierre étaient gravés des caractères ; et je m’avançai à travers le marécage de nénuphars, jusqu’à ce que je fusse tout près du rivage, afin de lire les caractères gravés dans la pierre. Mais je ne pus pas les déchiffrer. Et j’allais retourner vers le marécage, quand la lune brilla d’un rouge plus vif ; et je me retournai, et je regardai de nouveau vers le rocher et les caractères ; — et ces caractères étaient : Désolation.

Et je regardai en haut, et sur le faîte du rocher se tenait un homme ; et je me cachai parmi les nénuphars afin d’épier les actions de l’homme. Et l’homme était d’une forme grande et majestueuse, et, des épaules jusqu’au pieds, enveloppé dans la toge de l’ancienne Rome. Et le contour de sa personne était indistinct, — mais ses traits étaient les traits d’une divinité ; car, malgré le manteau de la nuit, et du brouillard, et de la lune, et de la rosée, rayonnaient les traits de sa face. Et son front était haut et pensif, et son oeil était effaré par le souci ; et dans les sillons de sa joue je lus les légendes du chagrin, de la fatigue, du dégoût de l’humanité, et d’une grande aspiration vers la solitude.

Et l’homme s’assit sur le rocher, et appuya sa tête sur sa main, et promena son regard sur la désolation. Il regarda les arbrisseaux toujours inquiets et les grands arbres primitifs ; il regarda, plus haut, le ciel plein de frôlements, et la lune cramoisie. Et j’étais blotti à l’abri des nénuphars, et j’observais les actions de l’homme. Et l’homme tremblait dans la solitude ; — cependant, la nuit avançait, et il restait assis sur le rocher.

Et l’homme détourna son regard du ciel, et le dirigea sur la lugubre rivière Zaïre, et sur les eaux jaunes et lugubres, et sur les pâles légions de nénuphars. Et l’homme écoutait les soupirs des nénuphars et le murmure qui sortait d’eux. Et j’étais blotti dans ma cachette, et j’épiais les actions de l’homme. Et l’homme tremblait dans la solitude ; — cependant, la nuit avançait, et il restait assis sur le rocher.

Alors je m’enfonçai dans les profondeurs lointaines du marécage, et je marchai sur la forêt pliante de nénuphars, et j’appelai les hippopotames qui habitaient les profondeurs du marécage. Et les hippopotames entendirent mon appel et vinrent avec les béhémoths jusqu’au pied du rocher, et rugirent hautement et effroyablement sous la lune. J’étais toujours blotti dans ma cachette, et je surveillais les actions de l’homme. Et l’homme tremblait dans la solitude : — cependant, la nuit avançait, et il restait assis sur le rocher.

Alors je maudis les éléments de la malédiction du tumulte ; et une effrayante tempête s’amassa dans le ciel, où naguère il n’y avait pas un souffle. Et le ciel devint livide de la violence de la tempête, — et la pluie battait la tête de l’homme, — et les flots de la rivière débordaient, — et la rivière torturée jaillissait en écume, — et les nénuphars criaient dans leurs lits, — et la forêt s’émiettait au vent, — et le tonnerre roulait, — et l’éclair tombait, — et le roc vacillait sur ses fondements. Et j’étais toujours blotti dans ma cachette pour épier les actions de l’homme. Et l’homme tremblait dans la solitude ; — cependant, la nuit avançait, et il restait assis sur le rocher.

Alors je fus irrité, et je maudis de la malédiction du silence la rivière et les nénuphars, et le vent, et la forêt, et le ciel, et le tonnerre, et les soupirs des nénuphars. Et ils furent frappés de la malédiction, et ils devinrent muets. Et la lune cessa de faire péniblement sa route dans le ciel, — et le tonnerre expira, — et l’éclair ne jaillit plus, — et les nuages pendirent immobiles, — et les eaux redescendirent dans leur lit et y restèrent, — et les arbres cessèrent de se balancer, — les nénuphars ne soupirèrent plus, — et il ne s’éleva plus de leur foule le moindre murmure, ni l’ombre d’un son dans tout le vaste désert sans limites. Et je regardai les caractères du rocher et ils étaient changés ; — et maintenant ils formaient le mot : Silence.

Et mes yeux tombèrent sur la figure de l’homme, et sa figure était pâle de terreur. Et précipitamment il leva sa tête de sa main, il se dressa sur le rocher, et tendit l’oreille. Mais il n’y avait pas de voix dans tout le vaste désert sans limites, et les caractères gravés sur le rocher étaient : Silence. Et l’homme frissonna, et il fit volte-face, et il s’enfuit loin, loin, précipitamment, si bien que je ne le vis plus.

....................................................

— Or, il y a de biens beaux contes dans les livres des Mages, — dans les mélancoliques livres des Mages, qui sont reliés en fer. Il y a là, dis-je, de splendides histoires du Ciel, et de la Terre, et de la puissante Mer, — et des Génies qui ont régné sur la mer, sur la terre et sur le ciel sublime. Il y avait aussi beaucoup de science dans les paroles qui ont été dites par les Sybilles ; et de saintes, saintes choses ont été entendues jadis par les sombres feuilles qui tremblaient autour de Dodone ; mais, comme il est vrai qu’Allah est vivant, je tiens cette fable que m’a contée le Démon, quand il s’assit à côté de moi dans l’ombre de la tombe, pour la plus étonnante de toutes ! Et quand le Démon eut fini son histoire, il se renversa dans la profondeur de la tombe, et se mit à rire. Et je ne pus pas rire avec le Démon, et il me maudit parce que je ne pouvais pas rire. Et le lynx, qui demeure dans la tombe pour l’éternité, en sortit, et il se coucha aux pieds du Démon, et il le regarda fixement dans les yeux.
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Message  Kashima Ven 5 Aoû 2011 - 7:54

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Edgar Allan Poe, poésie et fantastique Empty Le Démon de la Perversité

Message  Kashima Mar 9 Aoû 2011 - 9:50

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"Nous sommes sur le bord d’un précipice. Nous regardons dans l’abîme, — nous éprouvons du malaise et du vertige. Notre premier mouvement est de reculer devant le danger. Inexplicablement nous restons. Peu à peu notre malaise, notre vertige, notre horreur, se confondent dans un sentiment nuageux et indéfinissable. Graduellement, insensiblement, ce nuage prend une forme, comme la vapeur de la bouteille d’où s’élevait le génie des Mille et une Nuits. Mais de notre nuage, sur le bord du précipice, s’élève, de plus en plus palpable, une forme mille fois plus terrible qu’aucun génie, qu’aucun démon des fables ; et cependant ce n’est qu’une pensée, mais une pensée effroyable, une pensée qui glace la moelle même de nos os, et les pénètre des féroces délices de son horreur. C’est simplement cette idée: « Quelles seraient nos sensations durant le parcours d’une chute faite d’une telle hauteur ? » Et cette chute, — cet anéantissement foudroyant, — par la simple raison qu’ils impliquent la plus affreuse, la plus odieuse de toutes les plus affreuses et de toutes les plus odieuses images de mort et de souffrance qui se soient jamais présentées à notre imagination, — par cette simple raison, nous les désirons alors plus ardemment."

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Message  Kashima Mar 25 Oct 2011 - 14:23

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Edgar Allan Poe, poésie et fantastique Empty Le Corbeau

Message  Kashima Dim 11 Mai 2014 - 18:41

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"Jusqu’à ce que le De profundis de son Espérance eût pris ce mélancolique refrain : Jamais, jamais plus !"

"The Raven", Edgar Poe
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