Vie du chien Horla
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Vie du chien Horla
Le maître raconte sa vie avec Horla et avec ses autres chiens : il part chercher, dans les environs de la Rochelle, un labrador sable. Quelques jours plus tard, il ramène aussi un petit chien noir, le frère d'Hapax, qui lui avait manifesté une grande affection par des "lèchements de mains, mordillages divers, cabrioles et battements de queue".
Sur le chemin de la maison, qui est une tour, un pigeonnier, le petit labrador noir ne cesse de hurler : que pleure-t-il?
Arrivé au lieu de sa vie future, il retrouve son frère sable et se sent déjà chez lui.
Le maître nous raconte son amour des chiens, leurs différences de comportement et de caractère, en se gardant bien du défaut de l'écrivain qui prendrait ses distances pour qu'on ne l'accuse pas de mièvrerie.
Horla tient son nom de Maupassant, de ce fantôme qui vient vider la nuit la carafe ou de l'aérostat qu'il est dans un autre texte : c'est le côté sombre de ce nom qui a fait que le chien s'est appelé ainsi, lui qui aime tant son maître mais se plaît aussi à disparaître dans la campagne, ne laissant voir de lui parfois que "deux yeux fixes, très lumineux, dorés, suspendus dans le vide, et qui brillaient entre les branches."
Il y a de beaux passages, comme celui-ci :
“On sentait bien qu’ils étaient pour lui un mystère [en parlant de son autre chien Homps, un bleu de Gascogne qui semble ne pas du tout comprendre l'intérêt que Hapax et Horla attachent à une balle ou un bâton], mais un de ces mystères mystérieux entre tous, de ceux qui ont le moins de chance d’être jamais percés : un mystère dont on ne se soucie pas, qui ne vous intrigue en rien et dont la solution vous est indifférente.”
Et ces lignes que je trouve magnifiques :
“Tout se mélange. Il n’y a pas la vie d’un côté, la mort de l’autre. Il n’y a pas ici la raison, et la folie sur cette autre rive, en face, bien séparée. Il n’y a même pas la santé, qui un beau jour s’arrêterait d’un coup, pour faire place à la maladie. Très avant dans le territoire du chagrin, le bonheur a encore ses enclaves, ses bons moments, ses rémissions.
La folie et la mort sont des contrebandières. Elles ne cessent de franchir les frontières. Elles vont et viennent, ce sont des passe-murailles, des Latude, des Robert Houdin. Elles empruntent les miroirs, elles connaissent des sentiers dans la montagne, elles ont leurs barques au bord des fleuves, parmi les roseaux gris dans la lumière. On les voit cheminer dans les trains mal éclairés du soir, couverts de graffitis, et leurs vitres embuées. Elles voyagent sur des rafiots de nuit. Elles débarquent dans des criques. On les reconnaît à de soudains fléchissements de la phrase, à des mots qui se dérobent, des creux sournois dans la présence.
Très tard, il y a encore des jours heureux - c’est déjà de l’autre côté. Il y a de jolies promenades, mais c’est au pays des ombres.”
L'épisode furtif du chat qui s'invite à la maison a fait écho à des choses personnelles, comme beaucoup de choses dans le reste du livre. Quiconque aime les chiens ne peut que retrouver dans ce texte très bien écrit et qui fait sourire par moments, pleurer aussi à la fin, comme on s'y attend malheureusement, à cause de la fatalité des espérances de vie trop différentes.
Kashima- Faux-monnayeur
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