Stéphanie Hochet
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Stéphanie Hochet
Stéphanie Hochet est née en 1975.
A ses débuts de romancière, lectrice d'Amélie Nothomb, je l'ai vue témoigner, encore anonyme, sur elle. Par exemple, dans l'émission Recto Verso, en 2000, elle parlait d'Amélie en tant qu'amie.
C'est peu après que paraîtra son premier livre, Moutarde douce, un roman épistolaire qui pourrait avoir des échos des Jeunes filles de Montherlant, tant aimées d'Amélie. Je l'ai lu, l'ai aimé :
"Marc Schwerin est écrivain et entretient des relations épistolaires avec ses lecteurs. Il est même sous le charme de lectrices qu'il ne peut s'empêcher d'imaginer. Mais l'imagination a des pouvoirs qui se heurtent souvent à la crudité de la réalité! Marc s'en rend compte quand il fait la connaissance de deux de ses lectrices : Odette et Sonia."
Les deux romans d'elle que j'ai lus m'ont plu. Je ne connais pas ma force était un livre plaisant.
Il faut reconnaître que Stéphanie Hochet a un univers particulier, qu'elle se fait très discrète aussi... Depuis peu, elle est sous le patronage de Jacques Chessex qui l'a reconnue "parmi ses fous", comme on peut le lire dans une interview du dernier Magazine des Livres.
J'ai commencé La Distribution des Lumières, et je suis happée par ce récit : Pasquale est un Italien qui a quitté son pays à cause de Berlusconi ; il rencontre une jeune et belle prof de musique, Anna Lussing. Parallèlement, Aurèle, une jeune fille qui vit en banlieue et s'occupe de son demi-frère attardé, Jérôme, s'éprend de sa prof de musique qui n'est autre que cette Anna et découvre que celle-ci sort avec un homme :
"Que lui a-t-elle trouvé? Un charme que je n'ai pas vu? (...) Je n'ai jamais compris qu'une âme seule puisse susciter l'amour. On n'embrasse pas une âme. (...)J'étais vierge avant de connaître Madame Lussing. Son arrivée dans ma vie a sonné le tocsin de mon innocence sexuelle. (...) Je déteste Pasquale Villano. (...) Il est arrivé dans la vie de Madame Lussing au moment où j'ai su qu'elle serait tout pour moi." (46-47)
* Moutarde douce, éditions Robert Laffont, 2001
* Le Néant de Léon, éditions Stock, 2003
* L'Apocalypse selon Embrun, éditions Stock, 2004
* Les Infernales, éditions Stock, 2005
* Je ne connais pas ma force, éditions Fayard, 2007
* Combat de l'amour et de la faim, éditions Fayard, 2008 (Prix Lilas)
* La distribution des lumières, Flammarion, 2010
Dernière édition par Kashima le Lun 7 Mar 2011 - 13:20, édité 4 fois
Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
La distribution des lumières
La distribution des lumières est un roman prenant et très bien agencé avec ses différentes voix qui s'entrecroisent et ses personnages qui demeurent dans l'ombre mais n'en ont pas moins de force.
La folie et l'obsession amoureuse d'une adolescente, l'impuissance face à un régime absurde et destructeur (le berlusconisme), voici quelques-uns des thèmes abordés dans le livre.
J'ai eu le plaisir de discuter avec Stéphanie Hochet ce week-end, à l'occasion de la foire du livre de Brive. Le titre m'intriguait et je ne trouvais pas de réponse à mon questionnement. Pourquoi la distribution des lumières? Je prenais lumière dans le sens des Lumières qui ont éclairé l'Europe au XVIIIème et qui s'éteignent petit à petit, ou des lumières au sens d'intelligence (certains esprits ne sont pas très éclairés dans le livre et se retrouvent aveuglés par leur obsession).
Stéphanie Hochet m'a donné la piste à suivre : il s'agit d'un terme de peinture que j'ignorais, le jeu des lumières et des ombres sur une toile pour mettre en valeur tel ou tel personnage, tel ou tel élément. Ce jeu d'ombres et de lumières est aussi présent dans le livre, comme je l'ai évoqué ci-dessus.
Comme c'est bon de pouvoir discuter d'un livre qu'on vient de lire avec son démiurge!
Stéphanie Hochet conseille de lire en priorité celui-ci, Combat de l'amour et de la Faim et les Infernales, malheureusement épuisé.
Actuellement chez Flammarion, elle travaille à son nouveau roman.
La folie et l'obsession amoureuse d'une adolescente, l'impuissance face à un régime absurde et destructeur (le berlusconisme), voici quelques-uns des thèmes abordés dans le livre.
J'ai eu le plaisir de discuter avec Stéphanie Hochet ce week-end, à l'occasion de la foire du livre de Brive. Le titre m'intriguait et je ne trouvais pas de réponse à mon questionnement. Pourquoi la distribution des lumières? Je prenais lumière dans le sens des Lumières qui ont éclairé l'Europe au XVIIIème et qui s'éteignent petit à petit, ou des lumières au sens d'intelligence (certains esprits ne sont pas très éclairés dans le livre et se retrouvent aveuglés par leur obsession).
Stéphanie Hochet m'a donné la piste à suivre : il s'agit d'un terme de peinture que j'ignorais, le jeu des lumières et des ombres sur une toile pour mettre en valeur tel ou tel personnage, tel ou tel élément. Ce jeu d'ombres et de lumières est aussi présent dans le livre, comme je l'ai évoqué ci-dessus.
Comme c'est bon de pouvoir discuter d'un livre qu'on vient de lire avec son démiurge!
Stéphanie Hochet conseille de lire en priorité celui-ci, Combat de l'amour et de la Faim et les Infernales, malheureusement épuisé.
Actuellement chez Flammarion, elle travaille à son nouveau roman.
Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
Re: Stéphanie Hochet
Kashima a écrit:[...] des Lumières qui ont éclairé l'Europe au XVIIIème et qui s'éteignent petit à petit [...]
Très juste -- et très joliment dit. Notre période laisse effectivement l'impression d'une extinction où seules subsistent les étranges lueurs des autodafés. Le siècle des Lumières, les Trente glorieuses ou la parenthèse dorée ne sont plus ; l'obscurité gagne et avec elle l'obscurantisme.
x 1001.
x 1001.
Nicole.
L'Apocalypse selon Embrun
Ce n'est pas faire injure à Stéphanie Hochet que de dire qu'il règne sur ce livre l'esprit de Nothomb. Je n'ai pas pu m'empêcher de voir en Embrun une soeur diabolique de Plectrude (héroïne de Robert des noms propres).
Le livre commence par un mariage que perturbe la toux d'une enfant : "Au pays des enfants gras et roses vivait une petite fille chétive et brune qui s'appelait Embrun."
Pourquoi je la rapproche de Plectrude? Pour les conditions de sa naissance, par exemple. Cette dernière naît d'une mère criminelle qui a assassiné son compagnon et qui accouche en prison avant de se pendre. Les mauvais auspices, on les retrouve dans la famille d'Embrun : la grossesse d'Anne sera ponctuée par le sombrement dans la folie d'Albert : elle sortira célibataire de la maternité, le dégoût de son mari pour son corps de femme enceinte s'étant accentué au cours de la gestation. Gestation, oui, pour parler du monstre qui va voir le jour.
Embrun est une anti-héroïne, une enfant laide et détestable, le mal incarné.
Le roman est construit comme un texte religieux (la Genèse, l'Evangile... à la fin l'Apocalypse).
La naissance du mal et de son développement en la personne d'Embrun est le sujet du livre.
Ce roman se lit comme un conte.
Arrivée à la fin du livre, je reste un peu sur ma faim. J'aurais aimé que le cancrelat cher à la petite (elle aime les chancres, observer les fissures dans les murs et s'imaginer qu'un insecte hideux s'y terre) ait un rôle plus prononcé, bien que la métaphore soit utilisée dans les dernières pages, en lien avec la grossesse. Je m'attendais à un effondrement total de la vie de tous. Il est vrai que le mal s'est logé en Anne et qu'il n'en sortira plus, qu'il la mènera à la destruction, que la chute est amorcée chez tous les personnages du livre. Me fallait-il du plus spectaculaire, un Satan sanguinaire?
On entre dans les ténèbres d'Embrun, spectateur suspendu au mal qu'elle veut faire. Interdit de donner aux enfants le bon Dieu sans confession!
Le livre commence par un mariage que perturbe la toux d'une enfant : "Au pays des enfants gras et roses vivait une petite fille chétive et brune qui s'appelait Embrun."
Pourquoi je la rapproche de Plectrude? Pour les conditions de sa naissance, par exemple. Cette dernière naît d'une mère criminelle qui a assassiné son compagnon et qui accouche en prison avant de se pendre. Les mauvais auspices, on les retrouve dans la famille d'Embrun : la grossesse d'Anne sera ponctuée par le sombrement dans la folie d'Albert : elle sortira célibataire de la maternité, le dégoût de son mari pour son corps de femme enceinte s'étant accentué au cours de la gestation. Gestation, oui, pour parler du monstre qui va voir le jour.
Embrun est une anti-héroïne, une enfant laide et détestable, le mal incarné.
Le roman est construit comme un texte religieux (la Genèse, l'Evangile... à la fin l'Apocalypse).
La naissance du mal et de son développement en la personne d'Embrun est le sujet du livre.
Ce roman se lit comme un conte.
Arrivée à la fin du livre, je reste un peu sur ma faim. J'aurais aimé que le cancrelat cher à la petite (elle aime les chancres, observer les fissures dans les murs et s'imaginer qu'un insecte hideux s'y terre) ait un rôle plus prononcé, bien que la métaphore soit utilisée dans les dernières pages, en lien avec la grossesse. Je m'attendais à un effondrement total de la vie de tous. Il est vrai que le mal s'est logé en Anne et qu'il n'en sortira plus, qu'il la mènera à la destruction, que la chute est amorcée chez tous les personnages du livre. Me fallait-il du plus spectaculaire, un Satan sanguinaire?
On entre dans les ténèbres d'Embrun, spectateur suspendu au mal qu'elle veut faire. Interdit de donner aux enfants le bon Dieu sans confession!
Kashima- Faux-monnayeur
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Date d'inscription : 29/09/2008
Combat de l'Amour et de la Faim - Hochet
Stéphanie Hochet nous narre ici l'histoire d'un anti-héros : je ne dirais pas qu'il est détestable à souhait, mais il finit, peu à peu, par le devenir.
Marie Shortfellow ("Petit Homme"?) est le fils d'une femme qui se vend en espérant se mettre à l'abri du besoin. Une fois rentrée dans le rang, elle sacrifiera son fils à sa cause.
Ce dernier va croiser, dans son vagabondage creusé par l'amour et la faim, des femmes au nom des mois de l'année : May, April et June. C'est par hasard qu'il se verra finalement affublé du surnom de "coureur de dots", son identité l'a dépassé.
J'ai eu du mal à entrer dans le roman, pour finalement avoir envie d'aller au bout.
Combat de l'Amour et de la Faim a obtenu, en 2009, le prix Lilas.
"Description : Le prix de la Closerie des Lilas a pour originalité d'être un jury tournant et de couronner une romancière de langue française dont le livre paraît à la rentrée de janvier. Sa vocation : promouvoir la littérature féminine."
Extraits :
"La nuit, je serrais Heather dans mes bras de toutes les forces de mon imagination."
" Ce n'est pas parce que la nature est poétique qu'on devient poète." p 76
"On ne sait pas à partir de quoi le monde a été créé, mais on peut imaginer que l’agressivité et les désirs qui nous traversent sont la réplique miniature des éléments qui ont fondé l’univers. Je pris mon ventre comme théâtre. La forme convenait, abritait toutes sortes de passions. Je retirai le superflu : l'orgueil et le goût de la gloire. Il ne resta que le désir et le creux qui appelle la nourriture. L'amour qui hurle, la faim qui harcèle. Deux forces égales et contraires poussées l'une contre l'autre. Si on retourne dans le passé, on soupçonne ces deux forces d'avoir existé sous la forme de créatures animées. Les Anciens inventèrent l'engendrement du monde par les dieux. Deux Titans se livrèrent bataille. L'amour terrible, orgueilleux, et la faim, reine des tourments, des combats et des guerres." p 118
"Ce que l'on commet une fois peut être un accident, ce que l'on commet à maintes reprises devient une philosophie." p 126
"Les discordes sont des signes de passion, après tout." p 154
"Le suicide est un acte de boucher." p 167
Kashima- Faux-monnayeur
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Re: Stéphanie Hochet
La distribution des lumières, quel beau titre si bien trouvé... bel emprunt pictural...empreinte de clair-obscur! Rien que pour ce titre, j'ai envie de la lire.
LUMIÈRE, en peinture, se dit des effets de la lumière imités dans un tableau. On parle de belle distribution, belle économie, belle intelligence de lumière, bel effet de lumière.... Le clair-obscur est la juste distribution des ombres et de la lumière. On dira, par exemple, que les lumières sont bien entendues, bien ménagées dans un tableau ou ce peintre entend bien les lumières....
La trame de cette histoire semble être un clair-obscur et clair-obscur renvoie à Caravaggio,le Maître incontesté de cette technique.
Caravaggio, Le Martyre de saint Matthieu (1599/1600)
Dans Le Martyre de saint Matthieu , la lumière du soleil traverse le tableau pour se déverser à flot en son centre, sur le corps blanc de l’assassin et les tenues claires du saint martyr et du jeune garcon terrifié, contrastant avec les vêtements sombres des témoins disposés dans l’obscurité de ce qui semble être le chœur d’une église. Le saint écarte les bras comme pour accueillir la lumière et le martyre. Ainsi l’exécuteur, ne portant qu’un voile blanc et pur autour de la taille, semble un ange descendu du ciel dans la lumière divine pour accomplir le dessein de Dieu – plutôt qu’un assassin guidé par la main du démon. Il se pourrait même que le bourreau ne soit pas celui que l'on croit voir au premier coup d'œil. En effet, saint Matthieu est déjà blessé et un groupe de figures prend la fuite vers la gauche. Le bourreau serait alors parmi ceux-là. L'homme porterait alors secours au saint et aurait pris l'épée de la main encore ouverte de l'un des fuyards. L'homme du centre est également vêtu d'un drap comme le sont les deux figures du premier plan. Ces figures sont des fidèles venus se faire baptiser et l'un d'eux essaie de porter secours au saint.
LUMIÈRE, en peinture, se dit des effets de la lumière imités dans un tableau. On parle de belle distribution, belle économie, belle intelligence de lumière, bel effet de lumière.... Le clair-obscur est la juste distribution des ombres et de la lumière. On dira, par exemple, que les lumières sont bien entendues, bien ménagées dans un tableau ou ce peintre entend bien les lumières....
La trame de cette histoire semble être un clair-obscur et clair-obscur renvoie à Caravaggio,le Maître incontesté de cette technique.
Caravaggio, Le Martyre de saint Matthieu (1599/1600)
Dans Le Martyre de saint Matthieu , la lumière du soleil traverse le tableau pour se déverser à flot en son centre, sur le corps blanc de l’assassin et les tenues claires du saint martyr et du jeune garcon terrifié, contrastant avec les vêtements sombres des témoins disposés dans l’obscurité de ce qui semble être le chœur d’une église. Le saint écarte les bras comme pour accueillir la lumière et le martyre. Ainsi l’exécuteur, ne portant qu’un voile blanc et pur autour de la taille, semble un ange descendu du ciel dans la lumière divine pour accomplir le dessein de Dieu – plutôt qu’un assassin guidé par la main du démon. Il se pourrait même que le bourreau ne soit pas celui que l'on croit voir au premier coup d'œil. En effet, saint Matthieu est déjà blessé et un groupe de figures prend la fuite vers la gauche. Le bourreau serait alors parmi ceux-là. L'homme porterait alors secours au saint et aurait pris l'épée de la main encore ouverte de l'un des fuyards. L'homme du centre est également vêtu d'un drap comme le sont les deux figures du premier plan. Ces figures sont des fidèles venus se faire baptiser et l'un d'eux essaie de porter secours au saint.
Invité- Invité
Re: Stéphanie Hochet
Tu verras que ce titre prend tout son sens à la lumière de cette expression. L'ombre des uns met les autres dans la clarté, par ce jeu des voix qui alternent. Un peu comme dans les romans épistolaires.
Kashima- Faux-monnayeur
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Pétronille
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